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À la manière de haïku
                 
                 

Gratte, fils.
Place du graphiste dans la production d’image. Quelle place occupons-nous ? Occupe-je ?
Un scénario se renouvelle souvent, qu’il s’agisse d’images d’entreprises, d’images d’événements ponctuels, voire d’illustration (à définir - Bofa en donne une très intéressante).
En général, nous sommes mis en compétition car les commanditaires savent bien mettre en place des formes de compétition qui assure leur main mise sur le contrôle de la commande. Nous marchons dans la combine, déplaçant l’image à créer en défi à relever (amalgame entre défi personnel : trouver une idée et défi entre compétiteurs).
De cette combine, nous sommes souvent dupes, à n’en pas connaître les partenaires, les vraies finalités - internes, externes. Du jour au lendemain nous avons à prendre en charge des questions affectives plus ou moins énoncées à différents niveaux de conscience de la part de nos commanditaires et de leur entourage. Nous sommes loin de pouvoir mettre en place le discours gestionnaire du cahier des charges (quand il existe). Si tel était le cas, la part subjective serait reconnue (associations formelles du graphiste, réaction affectives du commanditaire). La part «idée» serait identifiée.
L’anecdote sur les couleurs n’est peut-être plus de mise – ce serait tant mieux – elle garde son intérêt : un fabricant de voitures faisait choisir les gammes couleurs par la femme du directeur et ses amies. On ne discutait pas de la couleur comme d’une autre composante de la voiture mais on en faisait une affaire de goût en s’adressant à des personnes de goût.
Ce qui confortait l’adage selon lequel on ne discute pas des goûts et des couleurs.
Nous graphistes, nous discutons des couleurs et il nous arrive d’avoir affaire à des personnes dont l’affect en matière de couleurs est définitivement bloqué.
Le comportement contraire celui de la demande de séduction n’est souvent qu’une variante de l’affect bloqué.
Nous entrons dans la combine par (je - jeu - le jeu des couleurs - par désir de séduction (message bien compris). Nos propositions colorées se succèdent... et par effet pervers elles deviennent l’enjeu, il s’agit dès lors pour le commanditaire de n’être jamais satisfait. Il préférait ce qu’il avait vu dans un autre dossier... il attendait mieux... puis vient le moment ou il faut en finir...
Alors intervient la favorite, silencieuse jusqu’alors, elle offre recours, c’est peut-être pour cela qu’elle est favorite, elle emporte le morceau. La tentative de séduction qu’on nous avait demandé échoue, la passion qui s’annonçait tombe avant d’être consommée.
On pourrait donner à ce marché de dupe le nom de « Stratégie du Sultan ».

Petit carnet gris, notes recopiées, 2002-2003